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Ville de Namur : déclaration politique et budget 17 décembre 2024

Voici mon intervention lors du conseil communal de Namur du 17 décembre 2024, en réaction à la Déclaration de Politique Communale de la Majorité MR-Les Engagés :

" Je voudrais poursuivre en saluant aussi nos jeunes, qui se battent pour essayer de défendre leur enseignement qualifiant. Dans la foulée de ce que Cécile vient d’expliquer, je crois qu’ils ont beaucoup de courage pour essayer de faire passer le message, et dans une ambiance où l’on a bien besoin de certaines formations pour les métiers en pénurie, y compris dans notre ville. On peut se demander comment l’esprit de la déclaration de politique communale, qui veut enclencher pour la formation des jeunes au travers de la Cité des Métiers – que Monsieur le nouveau président de notre assemblée connaît évidemment très bien –, peut, dans cet état d’esprit, permettre d’un autre côté de saccager à ce point des formations qui sont extrêmement nécessaires et qui portent haut les couleurs de notre ville, y compris à l’international. C’est assez incompréhensible.

Bref, dans cette déclaration de politique communale, des thématiques essentielles ressortent. Évidemment, j’imagine que c’est le fruit d’une réflexion profonde sur l’avenir de notre ville, mais il me semble que ce qui concerne la justice sociale, la lutte contre la pauvreté, l’émancipation des Namuroises et Namurois les plus fragiles mériterait d’être encore renforcé et surtout davantage détaillé. On le sait, les défis sociaux à Namur sont nombreux. Malgré les actions menées par le CPAS – et j’en profite pour féliciter la nouvelle présidente. Félicitations, Dorothée, pour ce nouveau mandat, je ne doute pas que tu le prendras à bras-le-corps –, malgré les actions du CPAS, notre ville doit progresser. La précarité dans certains quartiers, les familles monoparentales – il y avait aujourd’hui un colloque à ce sujet – peinent à joindre les deux bouts. Les jeunes décrocheurs scolaires sont toujours plus nombreux et la crise du logement frappe de plein fouet les plus vulnérables. Pour le logement, mon collègue Fabian vient d’en parler et largement, mais on a quand même l’impression que la déclaration semble insuffisante face à la crise du logement. Les objectifs manquent d’ambition pour augmenter l’offre de logement public, qui est un élément central pour garantir un droit au logement accessible à toutes et à tous.

Sur la fiscalité, les financements publics, on a l’impression de manquer un peu de mécanismes innovants. On aurait pu proposer, par exemple, des bons communaux pour financer des infrastructures sociales et environnementales en mobilisant l’économie, l’épargne locale. Mais aujourd’hui, l’approche qui est abordée par l’actuelle majorité pour répondre aux enjeux de logement, de mobilité, de transition écologique nous semble évidemment être plutôt de la rigueur budgétaire. Et donc rappelons que cette rigueur budgétaire doit être équilibrée avec des projets sociaux et climatiques plus ambitieux.

En termes de sécurité, on a l’impression que la politique plutôt sécuritaire qui est proposée pourra exacerber un sentiment chez les citoyens d’être perpétuellement contrôlés et ne pas s’attaquer aux causes structurelles de l’insécurité, qui finalement reste la grande précarité, l’exclusion sociale. Donc, un certain manque d’ambition pour éradiquer la pauvreté. C’est ce que nous devons faire pour un avenir meilleur.

Des actions fortes qui ne transparaissent pas dans la déclaration de politique communale. Vous allez me dire : vous allez faire un plan pour la législature ? J’imagine que l’on verra tout cela dans le futur document et nous attendrons évidemment, Madame la Présidente, des propositions par rapport aux services sociaux, aux aides aux plus précarisés des Namurois. Ces mesures seront fondamentales pour réduire les écarts sociaux encore accentués par les différentes crises que nous avons traversées et, pourquoi pas, tenter de réduire les écarts socio-économiques entre les différents quartiers de notre ville.

On sait, c’est aussi une réalité : Namur n’est pas une et unique. Il y a des quartiers différents : des quartiers où l’on vit bien, des quartiers où l’on vit moins bien, et des quartiers où vraiment peu, peu, peu de gens ont le bonheur de vivre dans la dignité. Et donc essayons aussi que notre ville puisse assurer un certain ascenseur social.

Sur la sécurité, j’ai abordé très, très rapidement aussi, mais dans la déclaration, il n’y a pas une ligne sur les agents de quartier. Le volet préventif, pour nous, n’est pas suffisamment abordé. Certes, il y a la question d’une zone Vigilis, des gardiens de la paix… Tout cela est assez dissuasif, certes, mais sur le fond, comment faire pour que ce sentiment d’insécurité ne soit plus aussi exacerbé et qu’il y ait cet effet de rassurer nos citoyennes et citoyens là où ils se trouvent, là où ils vivent ?

Sur la gouvernance participative, vous le mentionnez bien sûr, vous en faites état, mais on ne voit pas beaucoup de mécanismes concrets qui seraient décrits. Bien sûr, vous avez déjà abordé les budgets participatifs lors de précédentes législatures, mais on ne voit pas, par exemple, l’idée de référendum, ou l’idée des pétitions, tout ce qui aujourd’hui fait la vie démocratique citoyenne, si on peut l’appeler comme ça, et qui est appelé de tous ses vœux par toute une série d’associations. Bref, on a quand même l’impression qu’il y a une certaine réticence à partager le pouvoir avec les citoyens aujourd’hui.

Une question qui pourrait peut-être émerger aussi, qu’on ne trouve pas dans votre déclaration de politique communale, c’est la question des plaintes. Nos citoyens, parfois, éprouvent des difficultés avec nos services communaux, avec des explications peut-être qui n’ont pas été suffisantes ou pas bien comprises. Et je pense que là, on pourrait vraiment créer un service de médiation pour traiter des plaintes communales, en partenariat avec le médiateur wallon. Je pense que des propositions ont déjà été faites à plusieurs reprises, mais que malheureusement elles n’ont jamais reçu d’accueil positif. Et donc, je souhaiterais avoir votre avis sur cette perspective éventuelle de pouvoir fonctionner avec le médiateur wallon. Il y a plus d’une quarantaine de communes, on l’a dit au Parlement – on a plusieurs collègues ici maintenant dans la salle qui ont entendu le médiateur s’exprimer – et donc on pourrait, pourquoi pas, ajouter quelques lignes à cet égard dans notre déclaration de politique communale. C’est aussi une manière de jouer la transparence, c’est aussi une manière d’améliorer nos services, et c’est aussi une manière de faire comprendre aux citoyens qu’on les prend pleinement en considération.

Peut-être en termes de solidarité intergénérationnelle et intercommunale également, la déclaration ne prévoit pas d’actions ambitieuses pour intégrer les jeunes, les seniors, les familles précarisées dans une dynamique qui soit vraiment cette dynamique locale namuroise. C’est ce qu’on aurait pu tenter de retrouver et j’appuierai aussi sur les propos que vient de tenir ma collègue Cécile Geudvert : si on veut vraiment que nos jeunes Namurois préfigurent le Namur de demain, alors il faut leur donner de l’espoir, il faut leur donner l’envie. Il faut peut-être mettre en place plus d’actions pour qu’ils s’intègrent dans la société, qu’ils s’intègrent dans notre volet communal. Pourquoi pas créer des espaces de stage ? Pourquoi pas leur donner l’opportunité – cela existe à Nantes, par exemple – de s’inscrire sur une liste et qu’on fasse appel à eux pour venir aider dans les services communaux lorsqu’il y a une surcharge, avec un contrat d’étudiant très temporaire, exceptionnel ? Ou les mobiliser lors de grandes manifestations ? Bref, je pense qu’il y a moyen de réfléchir à l’inclusion avec des propositions beaucoup plus novatrices et beaucoup plus inclusives, bien entendu.

En ce qui concerne l’économie et donc la création d’emplois, on peut lire notamment : « il faudra identifier les zones propices à l’accueil des futures activités économiques sur notre territoire dans une démarche concertée ». Notre groupe ne peut s’empêcher d’être questionné sur le caractère un peu vague des intentions et sur notre impatience de voir comment se concrétiseront vos initiatives créatrices d’emploi à Namur. Nous sortons, quelques-uns ici, d’une réunion au Bureau économique et – c’est peut-être accessoire, mais je pense que c’est important de le signaler – des entreprises qui souhaitent s’implanter sur nos parcs d’activité économique se voient essuyer un refus de raccordement à l’électricité en raison de la saturation de l’alimentation. Et donc moi, je tire un signal d’alerte. Ici, on vit bien, on a notre électricité, mais c’est quand même une question fondamentale. Les nouveaux modes de consommation, les raccordements pour l’alimentation de la mobilité – donc les véhicules électriques –, les nouveaux modes plus écologiques avec les panneaux, mais aussi les décrochages sur les réseaux, enclenchent beaucoup de difficultés. Et donc, c’est probablement quelque chose qui devrait retenir l’attention de notre conseil communal également, pour essayer d’avoir des leviers, essayer de faire en sorte qu’il n’y ait pas de barrage à l’installation d’entreprises sur notre territoire en raison simplement du manque d’opportunités en matière d’alimentation électrique.

Nous entendons aussi et partageons d’ailleurs votre souhait de voir renforcer les commerces de proximité. Nous restons plutôt sceptiques quant à votre volonté d’être aux côtés des petits indépendants, parce que quand on vous voit, Monsieur le Bourgmestre, mais aussi Monsieur le négociateur, faire un peu corps avec le potentiel gouvernement fédéral qui devrait être institué – apparemment pas encore pour l’année 2024, mais pour l’année prochaine –, pour imposer le modèle d’ouverture du dimanche… À lire les retours de commerçants dans la presse nationale ces derniers temps, c’est aux grandes enseignes que profiterait l’opération, au détriment de la qualité de vie des travailleurs et des indépendants concernés. En ce sens, nous attirons particulièrement votre attention sur un équilibre fragile quant au développement commercial namurois, un thème, vous le savez, qui nous a beaucoup mobilisés et qui nous mobilisera encore au-delà de nos différences, notamment avec l’arrivée du projet au square Léopold. Il y va de la survie de notre ville et de son attractivité.

J’ai recherché les mots dans votre déclaration politique communale, « artisanat » ou « artisan ». Je n’ai rien trouvé ; je m’en suis trouvée fort déçue, évidemment, parce que le capital de notre ville, c’est aussi la force de ses commerçants locaux et de son artisanat. Pas un mot dans notre déclaration. J’ai recherché aussi « mixité sociale » ou « économie sociale ». J’ai bien trouvé « circuit court », ça oui, mais « économie sociale » ne figure pas parmi vos ambitions. J’espère que vous aurez l’occasion de vous rattraper à l’avenir.

Je voudrais aussi, en conclusion, dire qu’à l’entame de cette déclaration politique, vous commencez par l’idée que, suivant des chemins différents, majorité et opposition partagent un même objectif : celui d’améliorer le quotidien de notre population et donc d’accroître la qualité de vie à Namur. C’est vrai. Mais notre différence ne s’arrête cependant pas à une question de chemin ou de moyens : elle porte sur la définition même de cette population. La nôtre, la vision des socialistes, la conception de gauche, est infiniment plus large et plus inclusive que celle que vous laissez transparaître dans cette déclaration. Vous voulez un Namur où il fait bon vivre, certes, mais cela tranche avec la dégradation constatée par toutes et tous au cours des quinze dernières années. Nous voulons une amélioration pour toutes et tous, pas seulement pour celles et ceux qui auront encore la chance de pouvoir continuer à vivre dans notre ville demain, et pour leurs enfants après eux, dans une capitale qui continue à appartenir à ses habitants, pas seulement à celles et ceux qui peuvent se permettre d’y habiter décemment.

Pour nous, cette déclaration de politique manque d’ambition sociale, de vision environnementale et de mesures concrètes pour répondre aux défis de notre ville. Nous, socialistes, voulons une ville où chacun et chacune a sa place : où chacune et chacun peut se loger, se déplacer, s’épanouir, et surtout vivre dignement. Une ville solidaire, durable et inclusive, à la hauteur des attentes des Namuroises et des Namurois. En général, nous, à gauche, nous voulons nous concentrer sur des solutions structurelles pour garantir l’équité sociale et la transformation des quartiers. On trouve dans cette déclaration des réponses qui sont trop techniques ou immédiates, axées sur l’ordre et la sécurité. Bref, nous souhaitons demain participer à une politique qui place la dignité humaine au cœur de nos préoccupations. En tant qu’élus, cela nécessitera du temps, des ressources aussi, et surtout une volonté politique forte. Et alors, là, vous pourrez compter sur notre opposition constructive et toujours vigilante pour avancer dans cette direction."

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