Et si on s'occupait sérieusement de la démocratie? 30 novembre 2021
Le mardi 30 novembre, j’ai introduit, à la Chambre, la présentation d’une étude unique en son genre menée conjointement par le Centre d’étude de la Vie Politique (le Cévipol/ULB), le Vakgroep Politieke Wetenschappen (POLI/VUB) et l’application itsme®. Son objectif principal consiste à enrichir le débat sur la lutte contre le désengagement citoyen par rapport aux élections.
En effet, lors des derniers scrutins de 2019, 17 % des citoyens et citoyennes en âge de voter se sont détourné.e.s des urnes. Les raisons peuvent en être multiples : erreur dans la manière de compléter le bulletin (vote nul), problème pratique (souci de santé ou autre), ou choix délibéré de ne pas aller voter ou d’aller voter mais en rendant un bulletin blanc ou nul.
Cet abstentionnisme traduit un désintérêt ou parfois un mécontentement croissant à l’égard de la vie politique organisée au sein de nos institutions
Les débats à ce sujet se poursuivront tant à la Chambre qu’au Sénat afin de mieux comprendre les causes de cet important rejet, afin d’ouvrir le débat, ensemble et aux côtés des citoyens et citoyennes sur la question de l’abstention, et enfin afin d’y donner des réponses constructives et efficaces , car la démocratie est le ciment-même de notre société !
Voici le discours prononcé à cette occasion :
Mesdames et messieurs en vos titres et qualités,
Chers collègues,
C’est un moment important. L’activité de notre Assemblée est en effet très souvent, et c’est son rôle, occupée par l’actualité et l’immédiateté de la vie politique. Elle est aussi à l’écoute, comme vous l’êtes tous, des mouvements profonds qui traversent la société.
Et l’étude dont nous avons le plaisir d’accueillir la présentation aujourd’hui est de cet ordre.
C’est une étude unique, panoramique, analytique et pluridisciplinaire, effectué dans un pays où le vote obligatoire a longtemps minimisé la problématique du non-vote.
Or, face au déclin de la participation électorale, il est urgent de réfléchir aux facteurs qui conduisent les électeurs belges à voter blanc, nul ou à s’abstenir. De cette manière, nous pouvons ouvrir le débat sur les solutions qui permettraient de lutter contre un désengagement citoyen par rapport aux élections.
Le projet est une initiative portée par trois acteurs principaux :
-
Itsme® , l’application bien connue
Pour l’entreprise Belgian Mobile ID et son application d’identité en ligne itsme® - bel exemple d’une collaboration privée-public réussie - il s’agit de soutenir la réflexion autour du rôle et de l’impact possible de l’e-voting dans la société mais pas seulement. L’application itsme® qui est avant tout respectueuse de la vie privée dans le monde numérique, veut également apporter une contribution constructive aux enjeux de société auxquels l’État et ses concitoyens seront confrontés lors des prochains rendez-vous électoraux.
Depuis 2017, itsme® permet à chaque citoyen belge de s’identifier, de se connecter, de valider des transactions numériques et d’apposer des signatures officielles de manière mobile. L’application est facile d’utilisation, sécurisée et surtout, elle respecte la vie privée. L’application a été reconnue par les pouvoirs publics (BoSa) comme moyen d’identification de niveau de garantie ‘élevé’ depuis janvier 2018 et au niveau européen depuis décembre 2019. Aujourd’hui, l’application d’identité numérique a dépassé les 5,5 millions d’utilisateurs actifs.
-
Le Cevipol (Centre d’étude de la Vie Politique) de l’ULB, centre de référence en sciences politiques, représenté en l’espèce par Jean-Benoit Pilet et Maria Jimena Sanhueza (ULB) ; et la VUB (Vakgroep Politieke Wetenschappen), représentée par Silvia Erzeel, Didier Caluwaerts et Dave Sinardet (VUB)
Comme on le verra, l’analyse de ce phénomène politique réclamait une expertise de la discipline pour explorer adéquatement les multiples facteurs qui font que, par exemple lors des derniers scrutins de 2019, ce ne sont pas moins de 1.400.000 citoyens en âge de voter qui se sont détournés des urnes ; soit 17% de la population invitée à élire leurs élus. S’ils se coalisaient pour former un parti, ils seraient plus puissants que n’importe quel parti démocratique du pays.
Je voudrais souligner ici à quel point les chercheurs émérites de ces universités se sont réellement évertués à prendre en compte les contextes électoraux de l’ensemble de la Belgique fédérale, et à procéder à des enquêtes et analyses très profondes, et à une objectivation des données très précieuse pour nous.
Soyez-en déjà remerciés.
Cette étude, qui sera prolongée en 2022 par une analyse des mécanismes et démarches de participation citoyenne, jette en effet un éclairage nouveau et approfondi sur les multiples facteurs qui expliquent la désaffection par rapport au vote.
Et cette analyse nuancée a le mérite de faire surgir des recommandations crédibles, concrètes, et qui, je l’espère, alimenteront la réflexion et pousseront à l’action les partis politiques, les élus, les groupements engagés dans la gestion de la société.
Pour ma part, je suis très heureuse d’accueillir les auteurs de l’étude ce jour parmi nous, car ce rapport rejoint pleinement nos priorités pour la Chambre des représentants de Belgique : moderniser notre assemblée parlementaire et le préparer au monde de demain.
Cet objectif s’est concrétisé par la mise en place de plateformes numériques et à l’aide des réseaux sociaux pour permettre aux citoyen.ne.s de suivre en direct les débats en commission et en plénière et ainsi être informé.e.s en temps réel du résultat du vote d’une proposition de loi. Les décisions publiques doivent être prises ouvertement, aussi près que possible des citoyen.ne.s. Il est en effet fondamental que le Parlement devienne une véritable maison de la démocratie participative. Il s’agit de favoriser l’accessibilité des citoyen.ne.s par l’application d’outils, de méthodes et processus participatifs visant à recueillir la parole des citoyen.ne.s pour améliorer le fonctionnement du système politique, local comme national.
Récemment, nous avons permis la modernisation du droit de pétition avec le développement de la plateforme citoyenne « MyOpinion ». A l’avenir, nous devons progresser vers une démocratie encore plus participative avec, par exemple, la mise en place de panels citoyens traitant des sujets d’actualité.
J’y ajoute l’importance capitale à tout moment de la pédagogie, de l’explication, et de l’information de proximité, concrétisées notamment dans les outils de communication que la Chambre des représentants met en place (chaîne YouTube, réseaux socio-numériques, magazine de la Chambre et des décisions prises en son sein à destination des établissements pédagogiques, etc.).
Bref, il nous appartient de nous saisir sans attendre de cette question, merci et bravo donc, pour cette étude à la fois interpellante et inspirante, nous sommes à votre écoute !
Eliane Tillieux