Discours de fin de législature Mercredi 8 mai 2024
Discours de Madame Eliane Tillieux
Séance plénière du mercredi 8 mai 2024
Chères collègues, chers collègues,
Nous voici parvenus à la fin de cette 55e législature, au terme de 1 325 heures de débat en séance plénière et 10 015 heures en commission. En comparaison de la précédente législature, loin de la réduction du temps de travail, nous avons oeuvré 20 % de temps supplémentaire. Nous avons aussi adopté un nombre plus élevé de projets de loi (705). Le nombre de questions orales a atteint des sommets avec 40% d’augmentation (23 825 & 4033), du jamais vu, et vous avez particulièrement recouru au contrôle gouvernemental via les interpellations en séance plénière qui ont été 4 fois plus nombreuses (40 -> 175) !
Nous avons adopté d’importantes réformes en matière de justice, d’emploi et de pension. Nous avons pris des mesures essentielles en santé et en énergie pour traverser les crises en protégeant l’ensemble de la population, tout particulièrement les plus vulnérables.
Nous avons intégré le bien-être animal et le droit à la pleine inclusion des personnes en situation de handicap dans notre texte fondateur, la Constitution.
Cette inclusion, c’est aussi notre ligne de conduite lorsque nous assurons, par exemple, l’interprétation en langue des signes des questions orales et le sous-titrage de nos images vidéo pour rendre nos travaux plus accessibles à toutes et à tous.
L’ouverture à la société, au travers d’expositions dans notre péristyle ou l’organisation de journées thématiques publiques ont été des leitmotivs tout au long de ces années.
La transparence et l’éthique sont également essentiels. C’est pourquoi nous avons mis un terme aux régimes avantageux et compléments de pension au sein de notre assemblée.
Nous avons également engrangé des premiers pas vers une modernisation du fonctionnement de notre assemblée : réunions plus fonctionnelles, audit de la Cour des comptes, première ébauche de plan de personnel au encore passage de témoins au prochain Comité de Gouvernance et Bureau en sont quelques exemples.
Nous avons fait évoluer le droit de pétition et légiféré pour permettre dorénavant des commissions mixtes et des panels citoyens. Nous avons abaissé à 16 ans l’âge de vote pour le scrutin européen.
Face à la crise sanitaire, notre assemblée a dû s’adapter. Les vidéoconférences sont devenues monnaie courante. Le vote à distance a vu le jour.
En février 2021, nous avons approuvé le premier plan stratégique d’actions pour lutter contre le réchauffement climatique et un Fonds spécifique a été créé pour financer spécifiquement les investissements durables. La mise en œuvre de ce plan, couplée aux mesures de crise pour réduire la consommation d’énergie décidées fin septembre 2022, a permis par exemple de réaliser en un an une économie de 550 tonnes de CO2. Ceci s’est traduit par des certificats PEB meilleurs que la moyenne des bâtiments administratifs en région bruxelloise.
Notre salle des séances a été partiellement rénovée à l’été 2022 en vue d’améliorer les performances acoustiques et les anciens lustres ont été remplacés par un «nuage» lumineux composé d’un éclairage LED plus économe. Le remplacement complet de l’installation audio et du système de vote est prévu dès le lendemain de notre dernière séance.
Chères collègues, chers collègues,
La place des parlements dans les relations internationales est essentielle. La diplomatie parlementaire a pour vocation de servir la paix, la liberté et les droits fondamentaux.
Le contexte international s’est complexifié et est actuellement plus qu’incertain. En effet, plus de la moitié de la population mondiale se rendra aux urnes en 2024. L’ensemble de l’échiquier politique sera modifié, et peut-être de façon radicale. Plus que jamais, la diplomatie aura un rôle à jouer dans la prévention et la résolution des conflits.
Et malheureusement, les conflits perdurent autour de nous. La guerre en Ukraine n’a toujours pas trouvé d’issue, pas plus que le conflit entre Israël et le Hamas.
C’est dans ce contexte difficile que la Belgique assure depuis le premier janvier de cette année la présidence du Conseil de l’Union européenne. Le parlement fédéral a organisé une série de conférences interparlementaires autour de sujets comme l’autonomie stratégique de l’Union européenne, la compétitivité et la résilience de nos économies, la politique de genre ainsi que le respect de l’état de droit. Un symbole fort pour notre pays, engagé en faveur du multilatéralisme, du respect du droit international et des droits humains.
Cette présidence belge de l’Union Européenne a été l’opportunité d’un débat sur les enjeux sociaux et l’avenir de la démocratie, avec, en point d’orgue, l’adoption par les 27 parlements nationaux à Majorque le 23 avril 2024 de la Déclaration commune pour des parlements plus sensibles au genre. J’ai porté cette initiative pour un meilleur équilibre des genres dans les rôles au sein des parlements nationaux, un appel à devenir exemplaires dans la lutte contre les stéréotypes.
Alors que notre présidence touche à sa fin, il est crucial de souligner que l’intégration européenne doit se poursuivre, notamment en matière de défense. Il ne faut jamais oublier que la paix se mérite tous les jours.
La démocratie est-elle en danger ? Telle est la question que j’évoquais lors de la séance plénière du jeudi 22 février 2024 à l’occasion de l’hommage rendu à la mémoire d’Alexeï Navalny.
Chères collègues, chers collègues,
À l’heure où la campagne électorale bat son plein, je tiens à partager avec vous mes préoccupations concernant les défis cruciaux auxquels notre démocratie est confrontée. La fonction de Présidente de la Chambre des représentants m’a offert une perspective privilégiée sur le fonctionnement de nos institutions et l’importance vitale d’un débat public de qualité.
Il m’est préoccupant de constater à quel point le discours sur des questions complexes se trouve souvent simplifié à l’extrême, réduit à de simples slogans prétendument évidents et sensés. Face à la complexité, nous assistons à une tendance à la réduction, aux généralisations hâtives et aux banalisations qui déforment la réalité.
Sciemment ou non, ils s’ancrent dans un certain nombre de lieux communs, de stéréotypes et de clichés véhiculés au sein de la population. Plutôt que de les déconstruire, ils s’en trouvent renforcés.
Nous assistons depuis plusieurs années à une érosion de la confiance dans la politique et dans les personnes qui s’engagent en politique. Le nombre de nos collègues qui ont décidé de « passer à autre chose » est en soi révélateur.
J’en profite pour leur souhaiter bon vent dans leur nouveau choix de vie ou d’orientation.
Pour sauvegarder la santé et l’intégrité de la démocratie, puisse la Chambre des représentants rester le lieu de rencontre privilégié de notre État fédéral, un espace de dialogue et de confrontation d’idées, d’opinions politiques qui intègrent la complexité des enjeux sociétaux et qui se fondent sur une réflexion critique et une analyse approfondie pour proposer des solutions viables et durables.
Chères collègues, chers collègues,
Je tiens à exprimer ma gratitude envers notre greffier et ses adjoints pour leur investissement et leur dévouement, ainsi que le Directeur Général des services de la Questure et les équipes. Les services de la Chambre se sont investis, jour après jour, pour garantir le bon fonctionnement de notre institution et ont fourni à cet égard un travail de qualité remarquable. Les MP ont toujours été à nos côtés pour assurer notre sécurité. Qu’ils en soient toutes et tous vivement remerciés.
Je souhaite également rendre hommage à deux directeurs d’administration, Messieurs Luc Renmans et Daniel Lucion, pour qui cette séance plénière est la dernière d’une longue carrière à la Chambre, ainsi que d’une manière générale, à tous les membres du personnel qui ont accédé à la retraite au cours de cette législature.
Je tiens à remercier également les membres du Bureau, les chefs de groupe, les membres du Comité de gouvernance et vous toutes et tous pour votre contribution au bon déroulement des activités de notre assemblée, ainsi que pour le soutien et la confiance accordés dans l'exercice de la présidence. Je tiens également à saluer le Premier ministre et le gouvernement pour leur efficace et fructueuse collaboration.
Je souhaite tout particulièrement un bel avenir à celles et ceux qui ont investi toute leur carrière dans la défense de nos valeurs démocratiques, dont les chefs de groupe Mesdames De Block et Fonck, ainsi que M. Verherstraeten, et salue avec beaucoup de gratitude mes deux prédécesseurs Messieurs Patrick Dewael et André Flahaut pour leur investissement sans faille.
Enfin, je souhaite adresser mes remerciements à la presse, aux journalistes et aux équipes techniques, qui ont couvert avec beaucoup d’acuité et d’assiduité l’ensemble de nos activités.
Nous clôturons ici la séance parlementaire mais notre travail n’est pas fini pour autant. D’ici le 9 juin, il nous faut faire vivre et revigorer notre démocratie. Les élections constituent la pierre angulaire de la démocratie parlementaire. Je souhaite à toutes et tous une campagne électorale fructueuse. À celles et ceux qui ne se portent pas candidat, pour quelque raison que ce soit, je leur adresse tous mes vœux de succès dans leurs projets futurs.
Il est l’heure pour moi de quitter le perchoir de cette assemblée. Je voudrais vous exprimer toute ma gratitude pour ces années intenses de travail parlementaire.
Je suis honorée d’avoir été la première femme présidente de cette assemblée, et ce après 51 hommes depuis la création de la Belgique. Je formule le vœu que cette porte ouverte ouvre la voie pour d’autres à exercer les plus hautes responsabilités dans notre pays et faire de notre société une société plus respectueuse des femmes et des hommes qui la composent.
Il est de tradition à la Chambre que le Président du groupe politique le plus important prononce quelques mots. Je cède donc la parole à M De Roover.
Merci.