Commémoration par Ibuka Mémoire-Justice Asbl en mémoire des victimes du génocide au Rwanda 29 avril 2023
Commémoration organisée ce samedi 29 avril à Namur par Ibuka Mémoire-Justice Asbl, en mémoire des victimes du génocide au Rwanda qui s'est déroulé du 6 avril au 4 juillet 1994.
Se souvenir , c’est agir
L’acte de Mémoire que l’on accomplit ce jour, à Bruxelles, comme à Namur, comme à Kigali, vient relier le présent au passé autant que le présent au futur. Il est le témoignage de l’intemporel, de l’universel dont nous voulons garantir l’inscription la plus profonde.
Le passé dont on fait mémoire nous oblige en effet à l’égard de demain. Il y a un commandement au cœur de cet acte, nous le savons, nous le ressentons : faire en sorte que l’Histoire ne se répète pas. Il ne s’agit donc pas seulement de se souvenir, mais de s’engager. Cet engagement, nous l’avons pris près d’un million de fois et peut-être encore plus. Les disparus de 1994 nous exhortent chaque jour à le tenir pour ne pas avoir à mourir de nouveau. Pour que jamais le silence ne recouvre les cris d’un factice oubli.
La Mémoire est une histoire de mots et de gestes ; une histoire de lieux également. Des lieux où la parole prend place : parole perdue des disparus ; parole des pierres qui ont vu la souffrance et entendu les cris ; parole intime des témoins qui donnent corps à l’Histoire et posent les jalons de notre lutte perpétuelle contre l’oubli.
Lieux de Mémoire
Du mémorial de Gisozi à la stèle de Woluwe en passant par le Camp Kigali, la Colonne du Congrès et Flawinne, ces lieux de Mémoire nous rappellent ce qui durant cent jours s’est passé là-bas et qui, demain peut-être, pourrait se passer ailleurs. À intervalles réguliers, nous posons les mêmes gestes et disons les mêmes mots afin d’entretenir la flamme de notre conscience collective et de transmettre, génération après génération, l’héritage mondial que nous ont légué les suppliciés de Butare ou des collines de Bisesero.
D’un lieu à l’autre, nous apprenons à écouter et à reconnaître le bruit que fait un génocide. Il est proprement assourdissant, et pourtant, nous voulons nous en souvenir, nous voulons continuer de perpétuer le souvenir – celui des Tutsis au Rwanda, particulier et exemplaire en même temps.
Et celui, bien sûr, de nos dix para-commandos, qui l’ont entendu, ce bruit intenable. Ils sont morts pour ne plus jamais en entendre aucun autre. Cette année, comme toutes les autres et les suivantes, je l’espère, nous rendons hommage à leur courage et à leur dévouement.
Témoigner
Face à ce bruit qu’ils nous aident à affronter, les témoins du génocide sèment des graines sur les chemins torturés de la Mémoire. Ce sont la frappe, positive, et pacifiste, des histoires vécues. Mais ce sont aussi des histoires intimes, profondes, émotionnelles, personnelles.
Ce que personnellement je retiens, c’est cet immense réseau de riens qui se tisse entre témoins et acteurs, entre familles et institutions, parce ces dernières ont leur importance, elles sont le relais et le garant de la mémoire et de la persistance démocratique, à laquelle nous tenons tant.
C’est pourquoi, chers vous toutes et tous, je voudrais qu’ici encore, comme régulièrement nous le faisons parce que nous sommes, quelque part une armée de la paix en marche, nous prenions un engagement solennel et noble : celui de lutter toujours, comme le dit la chanson, en plein engagement, sans question ni retour, pour que la mémoire soit l’aiguillon de l’histoire à venir.
Résolument engagée pour l’émancipation individuelle et collective, je sens vibrer les chants de la liberté et de la reconnaissance de l’humanité dans les voix et dans les mots…
Continuons le combat ! IL est noble et universel. Ne renonçons jamais !
Eliane Tillieux